Hounnouvi Christian Coffi alias Kἑnù (bénin) un artiste ancré dans ses racines, Attaché à sa culture

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Il est autant à l’aise avec les rythmes béninois qu’avec le reggae et s’inspire aussi du jazz. Lui c’est Kἑnù (Kènu), un artiste béninois qui, malgré sa carrière d’enseignant à l’université d’Abomey- Calavi et à celle de Nantes, arrive à offrir au public béninois et africain des sonorités qui reflètent son itinéraire et ses nombreuses aventures à la recherche d’inspiration. Ce panafricaniste souhaite faire partie de ceux qui vont changer le regard que les autres ont du continent africain et apporter sa participation à la décolonisation des esprits grâce à son art.

Hounnouvi Christian Coffi alias K (en langue fon) est un artiste musicien béninois né en Côte d’Ivoire et qui vit entre la France et le Bénin. S’il est difficile pour beaucoup d’artistes d’être à la fois auteur, compositeur ou même interprète, Kènu lui coche toutes ces cases et veut “impacter” le monde à travers sa musique. Il veut faire prendre conscience aux jeunes Africains que la culture et l’histoire africaines doivent être désormais façonnées, portées et racontées par eux-mêmes.

Hounnouvi Christian est tombé amoureux de la musique depuis ses 10 ans. C’est à cet âge qu’il intègre une chorale congolaise, quelques années plus tard il se familiarise avec différents rythmes ivoiriens au sein des groupes d’ambiance facileencore appelés Wɔyɔ en Côte d’Ivoire. Il quitte la Côte d’Ivoire à ses 18 ans pour vivre de nouvelles aventures ailleurs.

<<IL EST DIFFICILE D’AVANCER DANS LA MUSIQUE LORSQU’ON S’ENTOURE UNIQUEMENT D’AMIS>>

En 2007, il crée le groupe “St8 of mind” (état d’esprit) avec des amis de la fac, mais le dissout en 2010 à cause d’une musique trop centrée sur le reggae et des difficultés à se fédérer autour d’une vision et d’objectifs communs. “Entre amis, il n’est pas toujours facile de se faire des reproches et d’avancer”, disait-il. Il prit alors quatre années pour repenser sa musique et élargir son univers musical. Sa rencontre en 2011 avec Majnun, un fou errant qui affirmait que dans l’art « les seules barrières qui existent sont celles qu’on se crée nous-mêmes », va aussi profondément bouleverser sa perception des choses.

Tout n’a pas été rose dans la vie et dans la carrière de Kènu. Au sein de sa famille, il a été victime des préjugés à cause de ses dreadlocks. Même si une partie de son public béninois a accepté son look qu’il associe à une « Philosophie » il n’est pas rare qu’on le considère, aujourd’hui encore, comme un chômeur dont l’un des hobbies est la consommation de substances illicites. Malheureusement, en Afrique et principalement au Bénin, les personnes en dreadlocks sont encore cataloguées et traitées de paria pour la plupart. Kènu a surmonté ces critiques pour les transformer en une énergie créatrice : « le plus important est de ne pas perdre de vue ses objectifs et de se souvenir des raisons pour lesquelles nous faisons nos choix ».

Malgré ces difficultés, en 2014 il revient avec le groupe Xhèviosso et une nouvelle vision inspirée de ses voyages au Brésil, en Espagne, aux Etats-Unis et au Sénégal notamment. Une des particularités de son nouveau groupe est que ses membres se trouvent aux quatre coins du monde. Selon l’artiste, c’est une des exigences de la musique actuelle. Ainsi, lorsque le groupe doit se produire en France, par exemple, il est plus simple de réunir une équipe avec des artistes déjà présents sur le territoire. Le nom de cette nouvelle formation est inspiré du Dieu de la foudre dans la mythologie béninoise. Comme on peut l’imaginer, il ne l’a pas choisi au hasard. Il veut être de ceux qui participeront à donner une image positive de l’Afrique. « La foudre détruit, mais les cendres qu’elle laisse derrière elle fertilisent la terre et font renaître la vie ».

En tant qu’enseignant, il espère aussi amener les plus jeunes à prendre conscience de l’importance et de la richesse de la culture béninoise. Dans cette optique, la plupart de ses titres sont principalement composés dans des langues du pays. C’est d’ailleurs cet amour de la culture qu’il essaie de transmettre dans son titre Jalavodo qui signifie en langue Fon “Noue bien ton pagne, porte-le avec noblesse”. Il y exhorte la jeune génération à se reconnecter à ses origines, à son histoire et à veiller à sa préservation et à son enrichissement. C’est seulement de cette façon qu’elle pourra apporter une identité authentique à la mosaïque culturelle mondiale. Jalavodo est une exhortation tirée des manifestations traditionnelles Vodun.

Kènu n’est pas seulement un artiste : il est aussi un enseignant-chercheur en espagnol. Un métier qu’il exerce principalement entre les Universités de Nantes et d’Abomey-Calavi à Cotonou. Il arrive, malgré son emploi du temps très chargé, à répondre à toutes ses obligations. Pour lui « tout est question d’organisation. Il faut savoir faire une bonne planification et donner le meilleur de soi à chaque moment (…). J’enseigne depuis 15 ans et, même si cela n’a pas toujours été facile, j’ai toujours eu à cœur de respecter mes différents engagements ».

En septembre prochain, il compte sortir un album qui sera disponible sur la plupart des plateformes digitales. Et dès le mois de novembre 2022, il entamera une tournée en Afrique, qui devrait se poursuivre en Europe au courant de l’an 2023 afin de faire découvrir son univers si singulier à tous ceux qui veulent l’entendre.

L’artiste béninois est peiné que ses titres ne passent pas beaucoup sur des chaînes de radios ou de télévisions locales, contrairement aux musiques populaires moins axées sur la mise en valeur de la diversité culturelle locale. Mais qui sait, peut-être que dans un futur proche les choses seront différentes…

Ses titres et clips sont disponibles sur sa chaine YouTube Kènu et le Xhèviosso. Il est sur les réseaux sociaux sous le nom de Kènu Xhèviosso.

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