Ngoné Ndour: parcours d’une dame de fer aux commandes de la SODAV

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Femme de caractère, Ngoné Ndour est une perfectionniste qui sait se donner les moyens d’atteindre ses objectifs. Ingénieure du son de formation, Ngoné Ndour a opté pour la production musicale. Aux côtés de son frère Youssou Ndour, elle a dirigé plusieurs de ses entreprises avant d’être aujourd’hui, à la tête de Prince Arts, une entreprise de production musicale qu’elle a mise sur pied avec deux de ses frères. En parallèle elle est la Présidente du Conseil d’Administration de la Société sénégalaise du droit d’auteur et du droit voisin (Sodav).

Ngoné est une brave dame qui a très tôt su ce qu’elle voulait. Elle a effectué son cursus scolaire au Sénégal jusqu’à l’obtention du baccalauréat avant de se rendre en Angleterre. Au début, il n’était guère question de faire de la musique. Mais une fois sur place, lors d’un concert elle entend parler d’une école de formation en ingénierie du son. Ce qui l’intéresse aussitôt. Ngoné Ndour s’en ouvre à son grand-frère Youssou N’dour qui l’encourage et l’accompagne.

A la fin de ses études elle rentre au Sénégal, enthousiaste à l’idée de pouvoir exercer son métier d’ingénieur de son, ce qui ne fut pas possible. A l’époque son frère n’avait pas encore de studio d’enregistrement. Elle intègre, alors, la Société Africaine de Production Musicale (SAPROM) en tant que secrétaire. De son petit bureau ouvert où il n’y avait qu’un téléphone, Ngoné Ndour observait et apprenait des autres. Plus tard, Youssou acquiert une usine de duplication de cassette et décide de la promouvoir Directrice. D’emblée, elle dit non. « Cette proposition m’a prise de haut au point que je l’ai déclinée. Mon frère et mentor avait estimé que j’avais les capacités nécessaires et m’a convaincue d’accepter. Ce n’est pas que je n’avais pas le potentiel pour y arriver mais j’avais peur, car j’étais timide. Ce poste fut mon premier grand poste de responsabilité. J’ai dirigé cette société pendant des années et ensuite les promotions se sont enchainées », a-t-elle confié.

Ngoné Ndour a ensuite accompagné son frère dans d’autres projets comme Jololi, Youssou Ndour Head Office qu’elle a dirigé à ses débuts…  La fermeture de Jololi ne l’a pas découragée.  Elle rebondit en créant, avec ses frères Ibou et Ndiaga Ndour, la société de production musicale, audiovisuelle et d’événementiel Prince Arts qu’elle dirige.

Ils ont débuté avec certains artistes qui étaient à Jololi avant de dénicher d’autres talents. Seulement, ils ne sont pas restés dans un seul registre. « Après Jololi, on a décidé de continuer le travail, on a gardé certains artistes et initié de nouveaux projets. Avant Sen ’Petit Gallé, il y a eu le Petit Bal des enfants. J’avais lu, un jour, une contribution d’une personne qui se demandait à quand le Petit bal des enfants. J’ai dit à Ibou que j’avais envie de lancer cet événement. Il était sceptique et se demandait si Youssou allait accepter. Finalement le projet s’est réalisé. Le jour de l’évènement, on s’est retrouvé avec 3000 personnes. Ce qui était une réussite pour moi. Au fur et à mesure, les choses se sont amplifiées et nous avons fini par lancer « Sen ’Petit Gallé », a renseigné Ngoné.

Très passionnée par la musique, Ngoné Ndour a décidé de s’investir pour ce secteur. Selon elle, un artiste n’est pas uniquement le chanteur, l’instrumentiste ou encore le peintre. Être artiste c’est un état d’esprit. « Je me sens artiste car je suis entourée d’artistes. Je suis amoureuse de la musique. Après de longues années à Prince Arts, je fais partie de ceux qui ont fait bouger les lignes, dans le domaine de la Production musicale au Sénégal, en militant pour le respect des droits d’auteurs et des droits voisins ». Ngoné Ndour est de ceux qui ont rédigé les textes régissant aujourd’hui la Sodav. « J’étais la seule femme dans le comité. On s’est battu, pendant plus de dix voir vingt ans pour qu’on remplace la loi de 1972 sur le droit d’auteur par la loi de 2008 sur les droits d’auteurs et les droits voisins avec une nouvelle société de gestion collective qui puisse reconnaître les droits des artistes qui ne sont pas auteurs. Il s’agit principalement des artistes interprètes et des producteurs. C’est ce qui a mené à la naissance de la Sodav », affirme-t-elle.

Le combat remporté, Ngoné Ndour intègre la Sodav en tant que membre du conseil d’administration (après avoir perdu les élections) sous la présidence de la réalisatrice Angèle Diabang. Pour elle, le plus important était de veiller à ce que le projet que le comité de pilotage avait porté jusqu’à la création de la Sodav puisse être réalisé. Toutefois, avant même que l’agrément de la Sodav ne soit signé par le président de la République, Angèle Diabang démissionne. Une autre élection est alors organisée et Ngoné fut élue Présidente du Conseil d’Administration. Dès son installation, elle commence le travail puisque l’agrément tant attendu a été signé, un peu avant son élection, par le Président Macky Sall.

Son mandat a été parsemé d’embûches. Les attaques ont été nombreuses mais elle a tenu bon. Elle a managé d’une main de maître la Société sénégalaise du droit d’auteur et du droit voisin jusqu’au terme de son mandat. Ce qui lui a permis d’ailleurs de rempiler.  Ngoné affirme mener une mission de bénévolat. Bénévolat parce qu’elle n’a accepté aucune indemnité. Pourtant, Dieu sait que le travail à la Sodav est fastidieux. « Gérer des artistes est ce qu’il y a de plus difficile. Le show business est un milieu ingrat où il y a beaucoup plus d’individualités. Certains dès qu’ils sont connus changent radicalement. Il faut avoir une forte personnalité pour les manager. Il ne faut surtout pas être ébloui par leurs talents, dès qu’on devient fan, on est faible. Il faut savoir faire la part des choses. Le milieu est très complexe et il faut avoir les nerfs solides, rester focus et professionnel ».

Ngoné Ndour est de ces femmes qui pensent qu’en matière de travail il n’y a pas de secret. Il faut se donner à fond pour réussir. Pour elle, les clefs du succès ne sont rien d’autres que la confiance, la compétence, la rigueur et le professionnalisme.

Aïssatou FAYE