Réinsertion des personnes handicapées: Michel & Ibrahim, un modèle à suivre

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Le centre de réinsertion professionnelle Michel & Ibrahim établi dans la commune de Wakhinane Nimzat dans le département de Guédiawaye (Région de Dakar) accueille, forme et emploie des femmes à mobilité réduite qui faisaient la manche dans les rues de Dakar. Créé par un humanitaire Belge par l’entremise d’un bénévole sénégalais, ce centre forme ses pensionnaires à la coupe et à la couture. Malgré leur qualification, elles ont d’énormes difficultés à commercialiser leur production et sollicitent à cet effet, l’accompagnement des pouvoirs étatiques pour accéder à la commande publique.

De la rue au professionnalisme…

Chacune devant sa machine à coudre, ces vingt-deux (22) femmes qui, autrefois, demandaient de l’aumône dans les rues de Dakar ont toutes été formées à la coupe et à la couture. Aujourd’hui, elles travaillent dignement et sont payées tous les mois, en plus d’être logées par leur employeur. Parmi elles, la responsable du centre, Adama Ndour. Elle témoigne : « je mendiais mais maintenant, j’ai arrêté et je travaille comme couturière dans ce centre avec toutes ces braves dames. Nous n’aurions jamais tendu la main, si on avait pu gagner dignement notre vie. La preuve, quand on nous a proposé d’intégrer le centre Michel et Ibrahim, nous avons accepté de quitter la rue…, par la Grâce de Dieu. » 

Dans la salle de production, qui abrite vingt et une (21 machines à coudre), la concentration est de mise. Les apprenties couturières s’attellent à la tâche. « Ce centre a changé ma vie. Je suis fière de l’avoir intégré. C’est tellement gratifiant de dire à mes enfants que je travaille. De plus, c’est un honneur pour moi car beaucoup de mes semblables sont dans la rue et je ne suis pas plus méritante qu’elles. Chaque handicapé mendiant aurait souhaité avoir un emploi plutôt que de tendre la main », affirme Seynabou Diagne une autre pensionnaire. Son rêve, c’est de créer, plus tard, un centre similaire pour accompagner les femmes en situation de handicap, ou encore mettre sur pied son propre atelier de couture pour subvenir à ses propres besoins. 

Une dignité retrouvée…

Ce centre de coupe et de couture, d’une superficie de 60 m2, est une bouffée d’oxygène pour ces femmes à mobilité réduite.  Elles semblent avoir retrouvé leur dignité en étant salariées.  Comme en témoignent toutes les employées du centre qui se sentent fières et enthousiastes de se rendre tous les matins au travail. Chaque matin, tout le monde arrive à l’heure au point de ralliement. Même celles qui habitent loin font l’effort d’arriver à l’heure. Ce qui montre que ces dames sont déterminées à réussir et aiment leur nouvelle activité génératrice de revenus », ajoute Seynabou Diagne qui affirme avoir toujours été attirée par la couture. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’elle n’a pas hésité à rejoindre le projet, aussitôt qu’elle en a été informée.  

L’appel à plus d’accompagnement 

Malgré leurs efforts et le travail remarquable qu’elles abattent, les pensionnaires du centre Michel et Ibrahim sont confrontées à certaines difficultés liées à l’accès aux marchés publics. C’est dans ce contexte que la présidente du Groupement des femmes du centre lance un appel aux autorités. « Nous demandons à l’Etat de nous octroyer des marchés de blouses pour les écoles. Nous sommes en mesure de produire des blouses scolaires car nous avons l’expertise requise et disposons du matériel de production. D’ailleurs, nous produisons nous-mêmes nos blouses de travail. Sa collègue Seynabou Diagne lui emboîte le pas en demandant à l’Etat, plus de considération, un accompagnement pour pouvoir écouler leurs productions afin de pérenniser leur activité.

La formation au sein du centre est assurée par M. Alioune Badara Diop, maître tailleur qui forme et supervise les pensionnaires, depuis l’ouverture de ce centre. Le coordonnateur du centre, Cheikh Ndiaye, se rappelle du sort des pensionnaires avant leur intégration. Il salue la bravoure de ces dames et leur résilience.  « Ce qu’elles gagnaient en tendant la main est plus important que leur salaire actuel mais elles ont opté pour la réinsertion. Le partenaire nous accompagne depuis la création du centre. Il a loué cette maison à trois cent mille francs CFA le mois et a engagé un formateur qu’il rémunère pour les former à la couture. Les femmes recrutées au centre ont un salaire de 60000 F CFA, en plus du transport qui est à la charge de l’employeur. Les charges sont lourdes, mais l’objectif de l’initiateur du projet est d’accompagner les bénéficiaires jusqu’à leur autonomisation. Actuellement elles ont une clientèle et confectionnent elles-mêmes leurs habits. Toutefois, leur principal défi reste la commercialisation de leurs produits », a indiqué M. Ndiaye. 

Ce centre est un projet pilote qui pourrait être reproduit dans d’autres localités du Sénégal, s’il est viable.

 

Ce modèle de réinsertion des couches vulnérables, peut être une solution pour éradiquer la mendicité.  L’objectif de ce centre est de former à la coupe et à la couture. A la fin de la formation, celles qui souhaitent travailler pour leurs comptes peuvent être accompagnées à acquérir une machine à coudre.  « Ce centre devrait susciter l’intérêt du ministère de la Femme et des Structures d’accompagnement à l’entrepreneuriat et à l’autonomisation des femmes. Malgré les multiples courriers restés sans réponses, nous lançons un appel une fois de plus à l’Etat et aux cinq communes du département Guédiawaye (un département de la région de Dakar) à accompagner ces valeureuses femmes à être définitivement autonomes », conclut M. Ndiaye.

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